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DISPARITION

100e anniversaire de la disparition de Sarah Bernhardt

Le 26 mars 1923, il y a 100 ans aujourd’hui, disparaissait la grande artiste.

En ce jour de commémoration, nul mieux que Mounet-Sully ne pouvait lui rendre plus sincère et plus vibrant hommage.

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« Sarah Bernhardt est une force de la nature, un être tellement supérieur aux autres qu’elle échappe au jugement. Je l’ai suivie pas à pas dans les étapes de sa longue et belle vie dramatique et maintenant que je la vois auréolée de tant gloire, je ne puis m’empêcher d’éprouver pour elle un sentiment très fort qui n’est point de l’admiration mais de la vénération.

Cette femme porte encore dans ses yeux la flamme d’une éternelle jeunesse. Ce n’est point une artiste ordinaire, c’est une créatrice. Elle n’interprète pas, elle suggère la beauté. Je ne l’ai jamais vue dans un rôle où elle n’apporte pas un peu du génie qu’elle porte en elle et même quand elle se trompe, l’erreur est toujours intéressante.

Elle a vécu toute sa vie dans un fourmillement de fantômes qu’elle a tous réalisés en les idéalisant ; elle a marché dans son rêve étoilé… trainant tous les cœurs après soi. C’est une metteuse en œuvre incomparable de beauté.

Elle est entrée un an avant moi à la Comédie-Française et je me souviens maintenant de la première pièce que nous avons jouée ensemble. […] Elle avait vingt-trois ans à cette époque et je l’ai vue dans ses débuts… Je l’ai admirée ensuite dans ses premières incarnations et je puis vous assurer qu’elle était tout aussi belle, aussi grande artiste en ce temps-là que maintenant ; elle portait en elle toutes ses merveilleuses qualités qui, peut-être, n’étaient pas encore affermies, dégagées aussi complètement qu’aujourd’hui, mais c’était déjà une artiste incomparable, à qui tout le monde pouvait prédire la carrière extraordinairement belle qu’elle a eue. Je ne puis m’empêcher d’une grande émotion lorsque j’évoque les souvenirs lointains. On disait d’elle et de moi que nous étions un « beau couple » sur scène ; on admirait notre façon de dire les vers et puis nous avons été jeunes ensemble…

Je la revois quelquefois… mais elle vit avec moi souvent dans mes rêves. L’image de Sarah Bernhardt est restée si vivante, si grande dans mon esprit que je la crois toujours à mes côtés parce qu’elle est inoubliable… »

Mounet-Sully

Interview Comoedia Vendredi 16 janvier 1914